Les pathologies alimentaires :
Les troubles de la conduite alimentaire :
Les observations de personnes souffrant de troubles alimentaires, dans l’excès ou la restriction, sont réalisées dés l’Antiquité. Toutefois, l’entrée de ces troubles dans les classifications des troubles mentaux est récente. Ces perturbations sont reconnues comme des souffrances psychopathologiques qui sont en lien avec des facteurs de vulnérabilité, des éléments psychologiques, génétiques et biologiques. Les facteurs sont donc nombreux et très différents d’un individu à l’autre. Les facteurs environnementaux comme la place de la femme ou de la maigreur dans les médias, sont reconnus comme des facteurs déclenchants mais pas suffisants en eux-mêmes.
Les troubles de la conduite alimentaire touchent généralement des jeunes filles durant la période pubertaire. L’anorexie mentale, restrictive, n’est pas en augmentation et reste, relativement, peu fréquente. Mais les troubles alimentaires sont en progression dans notre société de consommation où tout est abondance. Paradoxalement, lorsque nous faisons nos courses, nous trouvons à un moindre prix les chips et les sucreries, alors que le prix des légumes et de la viande augmente. La plupart de ces troubles alimentaires évoluent sur plusieurs années, avec des troubles psychiatriques associés et pouvant évoluer et osciller entre différentes pathologies, comme des passages entre l’anorexie et la boulimie.
Les troubles de la conduite alimentaire sont également à prendre en compte sur le plan somatique, avec des risques de décès, des retentissements sur la croissance ou sur la santé générale de la personne. C’est donc une préoccupation de santé publique. Il faut donc mettre en lien le travail du psychiatre et du médecin somaticien.
Plusieurs courants au 20ème siècle vont se succéder concernant la manière de voir ces pathologies :
M. Simmonds (1855-1925) en 1914 met l’accent sur un syndrome endocrinien déficient entraînant le comportement alimentaire. Une recherche active d’une affection neurologique alors en place auprès des patients.
L. Binswanger (1881-1966) en 1944 fut le premier à comparer le trouble alimentaire à la dépendance toxicomaniaque. C’est la première fois que ces troubles sont vus comme des addictions.
Freud parlait de névrose narcissique avec des sexualités génitales immatures chez des jeunes filles hystériques qui présentent des troubles anorexiques. Il y voyait une certaine forme de mélancolie* dans ce fonctionnement.
Les travaux analytiques plus contemporains expliquaient un refus d’identité sexuée chez ces jeunes filles qui refusait leur corps de femme et par là même refusait la sexualité en le montrant par leur refus d’incorporer la nourriture en elle.
Le premier modèle psychiatrique distingue essentiellement l’anorexie et la boulimie en premier lieu.
Le modèle psychiatrique des années 80 se construit autour des troubles alimentaires comprenant : l’anorexie, la boulimie, le trouble mixte (alternance des deux), l’hyperphagie, le grignotage pathologique et le syndrome d’alimentation nocturne.
Des comportements alimentaires problématiques sont repérés plus récemment : distinction notamment de plusieurs forme de fringales et de l’obésité.
Il est important de noter que, par exemple, l’anorexie existe également chez le nourrisson et chez l’enfant, même si ce trouble est rare.
Chez le nourrisson, ce trouble touche les enfants de 4 à 10 mois, généralement en lien avec le sevrage et donc le passage à l’alimentation solide. Le bébé refuse de manger et plus nous tentons de le lui proposer, plus il s’y oppose. C’est une apparition qui est souvent progressive.
Chez l’enfant, le trouble touche les enfants durant la période de latence* entre 6 et 12 ans. Ce trouble est moins connu et moins investigué par les psychiatres. C’est également plus rare que chez les adolescents mais il y a plus de garçons touchés que de filles à cette période. On y retrouve les mêmes symptômes que chez l’anorexie de l’adolescent.
Ces troubles ne sont pas des pathologies alimentaires mais bien des pathologies psychiques car la dimension psychologique est prévalente.
Les principes addictifs des troubles alimentaires :
Les troubles addictifs renferment différentes pathologies : l’alcoolisation, la toxicomanie, le tabagisme, les addictions comportementales.
Les troubles alimentaires sont considérés comme des addictions dans le sens où la nourriture devient une véritable drogue, y compris dans la croyance de l’anorexique qui pense ne pas avoir besoin de manger du tout ! L’addiction se définit comme une dépendance qui entraîne une conduite qui va se reproduire et qui entraîne une perte de liberté du sujet. La nourriture est comparée à une drogue car elle obsède celui qui tente de l’absorber en grande quantité (boulimique) ou qui tente de la repousser sans cesse (anorexique). Sur le plan neurologique, la nourriture et la drogue semblent suivre le même chemin dans le cerveau humain.
Nous pouvons donc constater que dans les troubles alimentaires, la personne perd le contrôle sur son comportement, elle utilise le déni* pour parler de la gravité de sa maladie et recherche des sensations fortes à travers son corps.
L’addiction entraîne également des effets de manque* et des effets de sevrage* qui sont également présents dans les troubles du comportement alimentaire. Les effets de manque sont insupportables sur le plan psychologique mais aussi physique, ce qui va amener la personne à reproduire son comportement pour faire baisser le niveau de tension interne ou le niveau d’angoisse qu’elle ressent en elle. Les effets de sevrage sont ressentis quand la personne, lors d’une hospitalisation, se voit empêcher dans la reproduction de son comportement, entraînant du manque.
Les principes liés à l’adolescence :
Les premières relations, fondamentales, qui lient un enfant à sa mère se font autour d’un objet essentiel, le « sein maternel » (un biberon ou un vrai sein). Cet objet permet d’apaiser la faim du bébé qui consiste en 3 sortes de nourriture : le lait nourricier, l’amour et la jouissance*. Le bébé a donc besoin d’être nourrit, d’être aimé et de goûter au plaisir. Le plaisir est ici très lié au corps de la mère et au corps du bébé qui se rencontrent dans ce moment intense. Des satisfactions et des frustrations naissent de ces moments là.
Mais ce couple fusionnel ne peut pas durer. Le père doit jouer son rôle de tiers séparateur pour amener le bébé à commencer le chemin de son individualisation, qui est un processus que nous nommons séparation/individuation qui va passer par plusieurs phases. La maman elle redevient aussi une femme et son bébé devient, petit à petit, un sujet à part entière pour ses deux parents. Que cela se passe bien ou pas dans cette étape, chacun va garder des traces très fortes de cette période que nous nommons l’oralité*.
La deuxième grande étape du processus de séparation/individuation va se produire à l’adolescence. L’adolescence en quête d’autonomie passe souvent par des conduites pour s’opposer ou se distinguer de ses parents nourriciers. L’alimentation qui possède une place importante dans notre société, signe de richesse, signe de bonne santé, devient un possible objet de conflit entre l’adolescent et sa famille. Pour certaines familles, il y a un désir de remplir le frigo à outrance, avec la peur de ne jamais manquer, avec l’envie de surconsommer comme si il voulait compenser le manque de communication ou de relation qui existe entre ses membres.
La contestation sur les repas est facile pour les adolescents : manque d’envie de se mettre à table, rupture de communication, négociation des heure de repas, souhaite manger autre chose, se revendique végétarien… Mais l’adolescent a également « faim », dans tous les sens du terme ! Il a faim tout le temps, poussé par les hormones, il a faim de découvertes, il a faim de rencontres, il a faim de liberté ! La notion d’oralité se retrouve dans le type de produits hyper consommé par les adolescents comme les laitages et les produits sucrés démontrant une forte régression vers l’oralité !
L’adolescence est dans tous les cas une période de fragilité, comme le homard au moment de la mue de sa carapace (expression utilisée par Françoise Dolto en parlant du complexe du homard). Cette période de remaniement sur le plan physique, psychologique, social et familial demande de la part des parents une grande créativité pour à la fois laisser partir son enfant et à la fois tenir les limites et le cadre de cet enfant encore immature. Ces fragilités sont parfois le cas de développement de pathologies psychologiques comme la dépression, les troubles du comportement ou les problèmes alimentaires. Ce qui est difficile, pour les parents mais aussi pour les professionnels, c’est de réussir à distinguer ce qui relève de l’adolescence normale de ce qui relève d’une adolescence en souffrance. Comment délimiter la déprime passagère de la dépression plus durable qui entraîne le risque de passage à l’acte suicidaire ? Comment distinguer quelques complexes des véritables troubles de l’image de soi pouvant conduire à des troubles alimentaires graves ?
L’anorexie mentale :
Même si nous avons tendance à les opposer, le passage de l’anorexie à la boulimie est assez fréquent, surtout dans les deux ans après l’apparition du premier trouble et plus souvent de l’anorexie vers la boulimie ensuite.
L’anorexie mentale se définit comme un trouble alimentaire qui se spécifie par une perte d’appétit qui entraîne une impossibilité de se nourrir au cours de nombreuses semaines, mois ou années. Cette pathologie est une obsession de la minceur.
L’anorexie est une forme restrictive pure dans cette présentation qui consiste en une lutte acharnée contre la faim. C’est sa forme la plus typique. C’est alors une restriction méthodique, résolue et poursuivie avec rigueur. Au départ, une simple envie de maigrir fait passer la jeune fille (là aussi une grande prévalence de jeune fille) complexée à une forme de jouissance de le contrôle de soi. Imaginez-vous ! Je n’ai pas besoin de manger pour vivre, je peux contrôler, voire maîtriser mon corps au point de ne plus sentir la faim, ce besoin si essentiel à nos vies ! Au-delà de ne pas manger, parfois l’anorexique met d’autres moyens de contrôle en place, notamment pour cacher son anorexie devant sa famille. Elle peut donc, quand elle mange pour faire semblant, prendre des laxatifs, se faire vomir, procéder à des lavements mais aussi faire du sport à outrance ! Au départ, bien sûr, la sensation de faim est là et la tenaille mais là aussi cette tension intérieure peut donner le sentiment de se rapprocher de son corps, de le sentir avec violence. La sensation de faim sera de moins en moins présente. Par contre, même si l’anorexique ne mange pas, la nourriture devient une obsession : elle cuisine pour les autres, calcule les calories, gave les autres…
Un autre aspect important dans l’anorexie mentale, c’est la dysmorphophobie* au niveau l’image de son corps. Bien que devenant extrêmement maigre, y compris sur le chiffre de la balance, l’anorexique continue de se voir énorme dans la glace… Parfois, comme dans le groupe des pro-anas (mouvement pro anorexique), les jeunes filles vont prôner la beauté de la maigreur.
La classification psychiatrique (DSM IV) détermine l’anorexie mentale suivant des critères très précis :
Refus de maintenir le poids corporel au niveau ou au-dessus du poids normal établit par l’IMC.
Peur intense de prendre du poids ou de devenir gros.
Altération de la perception du poids ou de la forme de son propre corps (déni de la maigreur)
Aménorrhée chez les jeunes filles pubères, c’est-à-dire, absence d’au moins trois cycles consécutives de règle.
Puberté retardée quand le trouble apparaît avant la puberté de la jeune fille.
Sur le plan de la personnalité, trois grandes caractéristiques psychologiques sont généralement observées chez ces jeunes filles anorexiques :
le désintérêt de la sexualité génitale : Il faut noter que la psychologie distingue la sexualité oedipienne, en lien avec les parents, de la sexualité génitale, qui nous permet de choisir un partenaire (choix hétéro ou homo). Chez l’anorexique il semble que l’amaigrissement lui permet de ne pas développer les attributs de sa féminité : les règles, les hanches, les seins… Ce refus de la féminité serait alors mis en parallèle à un refus de la séduction et des pulsions sexuelles. L’apparition des désirs sexuels est plutôt source d’angoisses. Elles peuvent également parler de regrets concernant leur enfance.
L’hyperactivité : Elle touche tous les plans comme la scolarité, les loisirs ou la socialisation. Elles ne restent pas passives, elles ne supportent pas de ne rien faire. Elles vont également faire du sport à outrance pour maîtriser une quelconque prise de poids. L’hyperactivité permet de ne pas se confronter aux angoisses, aux peurs ou à même se pencher sur soi-même. Elle entretient le déni des autres réalités, permettant donc de ne pas penser. Il y a donc comme un besoin de « brûler » sans arrêt de l’énergie, quelque soit la manière de le faire. Elles ne souhaitent pas rester tranquilles sur le plan physique comme sur le plan intellectuel. Les études sont également surinvesties où elles aiment être brillantes.
Une forme d’adaptation : elles tentent malgré tout de rester dans une vie qui pourrait être normale. Elles entretiennent des relations avec les autres, elles vont à l’école ou au travail…
Pour comprendre l’anorexie, plusieurs modèles ont été développés. Dans les approches psychodynamiques, les psychologues et les psychanalystes ont permis le développement de plusieurs hypothèses :
Au tout début, dans les années freudiennes, vers 1900, l’anorexie était considérée comme une conversion hystérique, c’est-à-dire comme le révélateur d’un conflit interne se dirigeant vers le corps de la femme.
C’est plus tard, avec Mélanie Klein et Otto Fénichel (1897-1946) que les auteurs mettent en avant le refus de la sexualité par une fixation de l’oralité mais aussi l’existence d’une relation d’emprise.
Plus tard encore, les questions de l’adolescence sont mises en avant avec notamment Philippe Jeammet qui en 1998 mettra en avant l’idée que se séparer des parents par le processus de séparation/individuation ne suivait pas le déroulement normal. Ici le trouble alimentaire vient éviter un effondrement dépressif massif chez l’adolescente et deviendrait alors une fonction défensive.
Il faut également noter que d’autres approches ont également formulé des hypothèses comme la psychologie cognitive. Par exemple, l’anorexie est pensée comme une phobie du poids. Dans cette hypothèse, le sujet est pris dan une grande peur de grossir et met donc en place des conduites d’évitement et de contrôle. Sous-jacent à cela, ces sujets sont dans des hypersensibilités et des vulnérabilités particulières.
Il existe également une forme dite « boulimique » où des vomissements et des compulsions alimentaires se mettent en place. Cette forme représente environ 30% des cas. L’anorexie touche 10% de garçon généralement.
Il faut noter également, concernant la perte de poids, que celle-ci peut atteindre 25 à 50% du poids corporel initial conduisant à ce que l’on nomme la cachexie, qui se définit par l’altération sévère de l’état général avec maigreur extrême.
La boulimie :
La boulimie est un trouble des conduites alimentaires (ou TCA). Elle se définit par un besoin incontrôlable d’absorber de la nourriture en grande quantité chez une personne qui n’est pas habituellement un « gros mangeur ».
Elle entraîne des comportements alimentaires inadaptés de contrôle de l’alimentation, du poids et du corps. Elle altère significativement la santé psychique et physique de celui qui en souffre. La relations aux autres et l’adaptabilité à son environnement devient également très complexe.
La boulimie se présente rarement seule. Elle est très souvent associée à d’autres troubles psychologiques comme la dépression et l’anxiété. Les adolescents peuvent également consommer à accès des drogues ou de l’alcool menant à des conduites addictives en plus de la consommation déviante de nourriture. Elle concerne beaucoup plus de jeunes filles que de garçons qui présentent des tableaux cliniques beaucoup plus graves sur le plan de la personnalité. Ce trouble est très fréquent mais son diagnostic est compliqué en pratique car nié par la personne très longtemps. C’est l’entourage qui en parle souvent en premier.
La classification psychiatrique (DSM IV) détermine la boulimie suivant des critères très précis :
Des épisodes récurrents de boulimie qui se décompose de deux manières : la consommation en une période de temps limitée, de quantité de nourriture qui est discutablement supérieure à ce que les gens peuvent manger et un sentiment de perte de contrôle sur son alimentation.
Des comportements compensatoires inadaptés récurrents visant à prévenir la prise de poids comme des vomissements, la prise de traitement, le jeûne, l’exercice physique excessif…
Les épisodes doivent intervenir, en moyenne, au moins deux fois par semaine pendant trois mois.
L’évaluation de soi montre une préoccupation importante sur la silhouette et la prise de poids.
Le trouble n’apparaît pas toujours exclusivement dans une période d’anorexie mentale.
La boulimie se manifeste donc chez l’adolescent en sorte de crises d’excès alimentaires effectuées en cachette et en solitaire, que nous nommons un rituel. Cette crise peut arriver à n’importe quel moment de la journée, généralement en lien avec des angoisses internes insupportables à gérer autrement qu’en mangeant. Au moment de la crise, l’adolescent se jette avec avidité sur toutes sortes de nourriture, généralement hyper calorique, que parfois même il s’interdit à table généralement. Cette frénésie n’a rien d’un grignotage habituel, le jeune va manger tout ce qui passe à sa portée, vidant d’abord le frigo, mangeant des boites de conserve froides, des plaquettes de beurre entière sans pain… Ce n’est donc pas un plaisir de manger ici mais une commande de se remplir pour calmer son angoisse. Mais l’angoisse ainsi calmée laissera la place à une culpabilité envahissante et une peur de grossir qui va pousser l’adolescent à sa faire vomir. Il y a donc en parallèle une obsession qui se met en place et qui concerne la forme de son corps et sa prise de poids.
Evidemment, l’entourage ne peut pas échapper longtemps à remarquer que son enfant vide le frigo et que celui-ci se fait vomir. Des tensions familiales sont alors perceptibles et la nourriture devient le principal sujet de préoccupation de tous ses membres. Les parents vont alors mettre en place des tentatives de contrôle et de surveillance de la nourriture alors que leur adolescent va mettre en place des stratégies d’évitement de ces contrôles. Ils peuvent alors passer par des attitudes déviantes comme cacher, voler, mentir…
Après une crise, l’adolescent se sent apaisé durant quelques temps. Finalement, le passage à l’acte permet toujours de faire baisser les tensions internes ressenties comme les angoisses. Ils affrontent durant la crise un sentiment de culpabilité mais aussi de dégoût d’eux-mêmes avec des douleurs abdominales importantes (trop plein pour le corps). C’est juste après la crise boulimique que la purge se réalise (se faire vomir).
Pour une analyse plus clinique, la boulimie n’est pas dictée par un appétit insatiable mais plutôt par un vide dévorant. La nourriture devient un moyen de combler un manque profond mais qu’elle ne peut jamais combler car ce n’est pas de faim dont il s’agit. D’ailleurs, les boulimiques vous diraient qu’elles ne profitent pas de leurs moments où elles mangent, elles n’en ressentent pas de plaisirs. Il y a une réelle contradiction, un paradoxe, en elles qui les amènent à la fois à gérer leur état de manque en se remplissant mais aussi à maîtriser leur poids pour compenser toute l’absorption de nourriture ! C’est ici que la comparaison avec l’alcool par exemple est le plus probant : la boulimique fait face au manque comme le dépendant à l’alcool qui doit revenir sans cesse à sa consommation. Le vide que la boulimique cherche à remplir ne peut jamais l’être par la nourriture, car ce n’est pas de cela qu’elle manque, mais plutôt un vide affectif ou en lien avec des difficultés de construction de soi dans la période de l’enfance. Il n’est pas question de juger les parents, tout cela sont des enjeux de relation et de perception, mais également de besoins du côté de la personnalité de son enfant que nous ne pouvons pas toujours comprendre en tant que parent !
Il existe également une autre forme de boulimie, la boulimie hyperphagique. Les crises sont assez identiques à la boulimie mais cette fois les purges ne sont pas utilisées ou très rarement. Cela signifie donc que dans cette forme de boulimie, l’adolescente à tendance à prendre du poids, parfois beaucoup de poids. Cela nécessite généralement une prise en charge sur le plan somatique pour gérer les problèmes possibles de diabète, de cholestérol, d’obésité morbide… Sur le plan alimentaire, le reste du temps, elle est très déstructurée, ne respectant ni les quantités ni les horaires. Parfois, elle ne fonctionne pas par crise mais s’alimentant beaucoup tout au long de la journée par des formes de grignotage incessant. Elle a donc très peu de contrôle de son poids, parfois même avec une envie inconsciente de s’enrober comme pour se protéger des attaques extérieures possibles.
Sur le plan de la personnalité, les jeunes filles boulimiques (car je le rappelle c’est la très grande majorité des boulimiques) présentent des grands manques de confiance en elle avec une impulsivité et une sensibilité extrême. Un peu comme un jeune enfant, elle fonctionne dans le « tout ou rien », dans le tout « tout de suite », contrôlant difficilement ces comportements. Beaucoup d’entres elles parlent de sentiment de vide, d’ennui ou de sentiment d’abandon. Chez beaucoup de ces jeunes filles, des traumatismes sont possibles durant la petite enfance (carences, maltraitances, abus sexuels). Il y a comme une certaine attaque du corps dans la boulimie, en mangeant excessivement. Elles cherchent quelque chose qui reste caché là-dedans… Elles sot également plus anxieuses que la moyenne des adolescentes et présentent aussi des obsessions, avec un besoin de contrôle.
Les troubles atypiques :
Ces troubles atypiques, et parce que leurs noms l’indiquent, sont difficiles à repérer et souvent méconnus de la médecine. Ils sont également souvent jugés sans gravité, ce qui entraîne une négligence dans la prise en charge rapide des troubles. Malgré tout, ils sont plus fréquents dans la population générale que l’anorexie et la boulimie dont on parle bien plus !
Nous pouvons retrouver ici : la restriction cognitive, l’orthorexie, la potomanie, le mérycisme ou la carpophobie.
La restriction cognitive :
Elle a été décrite en 1975 et désigne l’attitude des sujets qui limitent délibérément leur consommation alimentaire dans le but de perdre du poids ou éviter d’en prendre. Elle se définit donc comme une tentative, qui sera réussie ou non, de descendre à un poids inférieur ou de rester à un poids inférieur. Cette tentative est en lien avec le rejet du plaisir alimentaire mais aussi avec une référence des modèles sociaux et de la mode. Le problème c’est que ces restrictions mettent en péril la stabilité du poids et entraîne des carences par un déséquilibre alimentaire.
L’orthorexie :
L’Orthorexie vient du mot grec « orthos » qui signifie droit. Ici, le sujet souffre d’une véritable obsession à ingérer de la nourriture de qualité au détriment du plaisir et du goût. Manger sainement devient un défi de tous les instants. Le problème c’est que cette obsession est épuisante, source de souffrance et d’exclusion sociale. Le sujet est donc dans le refus de manger une alimentation qui serait de « plaisir ». Si c’est le cas, le sujet ressent une forte culpabilité. Ces aliments sont généralement les sucreries, les gâteaux, les plats en sauce, mais aussi le fromage, la viande… Ecarter tout risque de malbouffe prend beaucoup de temps et la personne souffrant de ce syndrome passe une bonne partie de sa journée à choisir ses aliments ou à y réfléchir.
La potomanie :
Ici, les personnes sont prises d’une envie irrésistible et incontrôlée de boire des quantités exagérées d’eau. Même si, généralement, cela concerne l’eau, certaines personnes peuvent boire n’importe quel liquide, y compris des liquides dangereux pour la santé. Cette maladie est difficile à détecter et peut passer complètement inaperçue. Il y a évidemment des conséquences importantes sur le plan somatique, notamment sur les reins qui n’arrivent plus à éliminer l’apport excessif en eau. Sans compter, évidemment, si la personne ingurgite toute la journée du coca ou tente le produit vaisselle.
Le mérycisme :
C’est une forme de rumination qui est lié à un besoin incontrôlable de rappeler dans sa bouche les aliments que l’on vient d’avaler. Ici, nous sommes bien dans une forme de pensée, différente du simple reflux gastrique, parfois inconsciente, d’obtenir du plaisir en reprenant en bouche des aliments qui sont déjà passés par là. La personne est donc en capacité consciente de faire remonter des aliments de son estomac pour à nouveau les mettre dans sa bouche et y obtenir du plaisir.
La carpophobie :
C’est une forme de phobie, rare, qui consiste à avoir peur des fruits. Il y a ici des répercutions sur l’équilibre alimentaire. La personne est sujette à de infections et des pertes de cheveux ou de dents. La réaction, comme toute phobie, à la vue des fruits est violente : angoisses, nausées, stress… Il y a également de la honte et de la souffrance dans cette phobie qui est bien classée dans les troubles alimentaires.
L’obésité :
L’obésité est définie par l’Organisation Mondiale de la Santé comme un excès de masse grasse, avec des conséquences néfastes pour la santé. La lutte contre l’obésité devient un objet central dans les problèmes de santé public parce qu’il y a des conséquences néfastes pour la santé et donc pris en charge par le système de soin général. L’obésité se calcule à partir de l’indice de masse corporelle, ou IMC, qui se base sur le rapport du poids en kilo et sur le carré de la taille (en mètre). Ce critère permet d’évaluer la masse grasse afin de poser des diagnostics. Entre 25 et 30, on parle de surpoids mais au-delà de 30, c’est le début de l’obésité. Chez l’enfant, les médecins utilisent en plus des courbes de référence. L’obésité est évidemment en lien avec des critères culturels.
Tous les troubles de l’obésité ne sont pas liés à des problèmes psychologiques, mais c’est sur ceux là que je m’attarderais. Il n’existe évidemment pas de profil type des personnes prédisposées à devenir obèse sur le plan psychologique. N’oublions pas non plus que lorsqu’une personne est obèse, elle va également souffrir de cette place particulière et de son rapport au corps et aux autres : moqueries, différences, mise de côté… On peut supposer que lorsque la souffrance est constante, le cercle vicieux s’installe : manger pour oublier à nouveau les moqueries que l’on reçoit à cause de son poids…
Si la personne est en excès de poids, notamment chez les enfants et les adolescents, il faut donc distinguer quelle est la souffrance psychologique liée à sa personnalité et quelle est la part de souffrance liée au fait d’être en surpoids et des conséquences sociales. La question, surtout pour les plus jeunes, va se poser autour de la famille et de son histoire : des évènements particuliers, des anxiétés ou des angoisses. Il est évident qu’il ne faut pas accuser les parents de créer certaines situations instables mais plutôt de les aider à comprendre que tous les enfants n’ont pas la même sensibilité ou la même adaptabilité à ces situations, par exemple le divorce, le deuil…
De nombreux cas d’obésité sont liés aux grignotages mais aussi aux formes de boulimie hyperphagique. Il a également été démontrer les conséquences du stress sur la prise du poids, les chocs émotionnels, les médicaments pour la dépression notamment. Pour le stress, nous savons que nous ne sommes pas égaux face aux réactions physiologiques. Certains maigrissent, d’autres grossissent. Mais le stress est surtout reconnu pour le désordre alimentaire qu’il peut entraîner comme l’envie de manger des choses grasses ou sucrées, en dehors des repas…
Aujourd’hui, les spécialistes parlent même de grignotage émotionnel. C’est difficile de distinguer le grignotage de la faim réelle et nous savons que nos émotions sont liées à notre manière de manger. Le grignotage survient brusquement sans raison, sans envie de manger réelle sur le plan physiologique. L’envie de manger ne s’arrête pas non plus quand la personne a suffisamment mangé. Elle peut continuer à manger encore et encore car les émotions ou les angoisses sous-jacentes sont toujours là. On ne nourrit pas des émotions avec de la nourriture, cela ne marche donc pas. Les aliments choisis lors du grignotage sont soit tout ce qui se passe, car le seul but est de remplir ou alors un choix d’aliments avec sa sensibilité : glace ? Saucisson ? Derrière le grignotage surgit la culpabilité. Culpabilité de ne pas avoir résisté, de ne pas avoir pu faire autrement, culpabilité de se sentir gros ou mal dans sa peau. Cette culpabilité fait partie du cercle vicieux qui peut amener la personne à manger de nouveau.
Dans les chocs émotionnels, il existe également deux possibilités pour le gérer : soit de ne plus rien avaler soit de se saisir de la nourriture pour se réconforter, appelée la comfort food. Là aussi il s’agit d’une tentative pour gérer ses émotions comme vu précédemment. Les spécialistes s’accordent pour dire que c’est une conduite normale que de cherche à s’apaiser en mangeant, le problème, et donc la pathologie commence, quand la nourriture n’apaise rien du tout, voire fait culpabiliser et donc angoisser.
J’ai également pu observer chez certains patients une volonté inconsciente de s’entourer de couches ou de remparts pour se protéger, pour ne pas être atteint, en lien avec des histoires traumatiques ou des histoires familiales douloureuses. Il existe également une question pulsionnelle, un lien entre le plaisir et l’interdit où le plaisir domine. Dans notre société de consommation et d’abondance, la place de la gourmandise et du plaisir est plus que particulière !
Il est intéressant de se pencher sur l’image du corps de l’obèse. Lorsque je travaillais avec des ostéopathes en formation, plusieurs questions revenaient souvent : comment manipuler certaines personnes en surpoids, le poids sur la table… Il faut savoir qu’au-dessus d’un certain poids, vous ne pouvez plus faire de radio avec un appareil classique mais vous devez être pris en charge par des machines pour animaux… Comment pensez son corps dans ce cas, sachant qu’il est un support important de notre identité ? Son corps est souvent floue avec des contours difficiles à déterminer ou alors un corps clivé comme si la tête, appelée aussi le mental, était coupé de son corps et ne le ressentait plus. Cette image doit être réinvestie pour donner l’impulsion de la perte de poids ou du régime.
Il est évident que le soutien psychologique doit être proposé aux personnes qui souhaitent passer par une chirurgie pour maigrir pour les aider à investir un nouveau corps, qui, dans beaucoup de cas, va changer très vite. L’évaluation psychologique précédente à l’opération doit démontrer que la prise de poids n’est pas liée à des comportements alimentaires dangereux pour éviter des dysfonctionnements graves aux opérations.
Les psychothérapies :
La psychothérapie permet de mettre en lumière les relations explicites et implicites qu’une personne, atteinte de troubles alimentaires, entretient avec la nourriture. Elle permet donc de travailler sur les facteurs déclenchants et aggravants de la pathologie. Elle n’est pas une prise en charge car le patient est acteur de son traitement. Elle n’est pas non plus une simple introspection car comprendre ne suffit pas toujours à la guérison (ce que la psychanalyse appelle la catharsis*). Elle permet donc de prendre en compte ses valeurs, son passé, ses vulnérabilités (faiblesses) et ses ressources (forces), ses conditionnements, ses emprises et ses dépendances…
Il ne faut tout de même pas oublier que tous ces troubles entraînent des conséquences plus ou moins graves sur l’organisme et donc demande à être pris en charge par un médecin traitant ou des spécialistes somaticiens. Nous pouvons également rapidement rappeler la nécessité d’hospitalisation des personnes, notamment dans l’anorexie, quand le poids minimum est dépassé et que leur vie est en danger.
Dans la plupart des cas, une évaluation et une prise en charge avec un psychiatre peuvent être envisagées en plus de la prise en charge psychologique (psychothérapique). Pourquoi ? Nous l’avons expliqué tout au long de ce cours, il y a une concomitance entre la dépression/l’anxiété et le trouble alimentaire. Il faut donc également traiter ces troubles psychiatriques qu’ils soient déclenchants ou aggravants.
Allez vers la psychothérapie demande nécessairement d’accepter d’aller mal ou d’être en souffrance. La première complexité va donc résider dans le déni que la plupart de ces personnes ont face à la gravité ou aux conséquences de leurs troubles. Le déni est mécanisme de défense extrêmement puissant qui consiste dans le retrait d’une part de la réalité. Prenons une jeune fille anorexique. Le déni joue sur son image du corps car elle se voit grosse, mais il joue aussi sur son impossibilité à penser la nourriture comme nécessaire, et la possibilité d’affaiblir son corps au point de mourir…
Il existe de nombreux lieux hospitaliers pour prendre en charge de manière pluridisciplinaire les troubles alimentaires : psychiatre, psychologue, infirmier, médecin, nutritionniste, sophrologue, thérapeutes familiaux… Ils peuvent à la fois proposer des prises en charge individuelles ou de groupes. Ils sont plus vigilants sur les nécessités d’hospitalisation. Si le choix va vers un thérapeute libéral, il vaut mieux orienter vers un professionnel qui est spécialisé dans les troubles alimentaires.
Dernière précision générale, réaliser une psychothérapie est souvent long, pénible, avec des moments profonds de doutes. Il est important de préciser cela et d’encourager le patient à continuer même si, dans certains moments, il ne voit pas encore les bénéfices directs sur lui-même ou les conflits avec l’entourage. Une psychothérapie mobilise des processus psychiques qui ont leurs propres rythmes. Chaque patient à son rythme.
Penchons-nous maintenant sur l’intérêt de certaines psychothérapies dans le soin des troubles alimentaires :
Psychanalyse :
Pour la psychanalyse, les troubles alimentaires prennent naissance au cours du développement psychique de la petite enfance, notamment sur la question de fixations orales lors du sevrage du bébé. La psychanalyse pense que les troubles alimentaires sont des pathologies qui reflètent des dépendances à l’autre. Il n’est pas question d’accusé les parents ou la mère, bien que souvent cette interprétation est été avancée à la défaveur des atouts de la psychanalyse. Si des perturbations surviennent dans le développement psychique de l’enfant, c’est avant tout pour des questions de relations et de besoins non comblés. Peut être que les parents n’ont pas vu les besoins de leur enfant ? Peut être que leur enfant avait des besoins bien plus grands à combler que d’autres enfants ? Peut être même que l’environnement a apporté son lot de difficultés (séparation, deuil…).
La psychanalyse pense donc que le trouble alimentaire est un symptôme lié à un conflit inconscient qui permet à la personne qui en souffre de se séparer de ses parents et de leur montrer leur impuissance, afin de se défendre de ce sentiment de dépendance. C’est Ph. Jeammet qui expliquait que « le trouble alimentaire était une tentative de sortie de la dépendance à l’autre en la remplaçant par une autre dépendance ». C’est ainsi que le patient va remplacer le besoin de l’autre, qui menace son intégrité et son indépendance, par le besoin d’un autre objet qu’il peut contrôler au départ, la nourriture.
La plupart des thérapeutes, psychiatres ou psychologues, font référence à la psychanalyse dan leur travail mais ne sont pas des psychanalystes. Il est clairement dangereux de pousser un patient vers cette pratique car elle peut être source d’angoisse et manque de guidance et d’étayage des patients. Dans la psychanalyse, le patient se débrouille souvent seul dans son élaboration avec un « psy » silencieux. Les patients ont plus besoin de thérapeutes un peu plus directifs. Elle peut s’envisager dans un second temps quand le patient est déjà sorti du cercle vicieux des troubles alimentaires, c’est-à-dire plusieurs années après la stabilisation.
Thérapie comportementale :
La méthode comportementaliste se focalise sur le symptôme actuel et n’attache aucune importance à l’histoire ou au passé du patient. L’idée principale réside dans le fait que toute cause à un effet et que les patients adaptent leurs comportements en fonction de ce qu’ils ont appris. Le principe est donc de comprendre le comportement et de le modifier.
La thérapie comportementale, associé aux théories du cognitivisme, est appelée TCC (Thérapie Cognitivo-Comportementale). LA TCC est une thérapie active qui met le patient dans l’action et pas dans la réflexion.
Elle va amener la personne à :
ré-apprendre à manger de manière équilibrée
ré-apprendre à ressentir les choses et identifier ses émotions
ré-apprendre à établir des relations sereines avec les autres
La thérapie comportementale vise donc l’émergence d’un nouvel équilibre physique et émotionnel qui permettra ensuite de s’attaquer à la problématique psychologique sous-jacente.
Thérapie familiale :
L’application des thérapies familiales est conseillée chez les patients plus jeunes, adolescents et jeunes adultes. Des théories qui mettent en avant les causalités familiales ont permis de faire de cette thérapie un moyen privilégié dans les traitements des troubles alimentaires. Même si ces théories ont été contestées aujourd’hui, car trop culpabilisante, la famille est toujours un point central pour deux raisons : elle peut être un facteur de protection pour son enfant et elle joue un rôle important dans l’aggravation ou la guérison des troubles.
L’objectif des thérapies familiales est donc de mobiliser les ressources et les compétences de la famille pour soutenir l’amélioration des symptômes et encourager les dynamiques relationnelles. La famille est donc au cœur du dispositif de soin : plus de séparation totale du patient et de sa famille lors de l’hospitalisation, implication des familles et cela quelque soit leur fonctionnement (même pathologique), collaboration des familles qui deviennent des co-thérapeutes…
Dans les thérapies familiales dites systémiques, le symptôme de l’enfant est toujours à comprendre comme un possible symptôme du dysfonctionnement de la famille ou du couple parental. Pour améliorer le symptôme de l’enfant, les thérapeutes pensent donc qu’il faut mobiliser toute la famille autour de l’enfant afin de mieux comprendre les places, rôles et fonctions de chacun afin de faire bouger ces fonctionnements et donc bouger les symptôme.
En résumé, les troubles du comportement alimentaire touche avant tout les jeunes filles qui sont fragilisées par l’entrée dans la puberté. Même si ces troubles peuvent toucher également des enfants et des garçons. Les troubles du comportement alimentaires peuvent être de plusieurs ordres, parfois complètement opposés, comme l’anorexie et la boulimie. D’autres troubles moins connus sont tout aussi importants à diagnostiquer et à soigner. L’importance sera de conjuguer le travail d’une équipe pluridisciplinaire et donc complémentaire pour soigner ces pathologies d’origines psychiques mais qui ne sont pas sans conséquences sur le somatique.