Le Zen, de l'utile et de l'agréable.
Le zen de l’utile et de l’agréable.
Je me souviens de cette période où j’ai découvert le zen. A l’époque j’étais à l’école de journalisme et mon camarade de classe, d’une nature moqueuse, me dira « de toute façon ça ne sert à rien »… Justement, c’était cela qui me plaisait.
L’époque est à l’utile. Ne sommes nous pas en train de nous transformer en « consommateurs ou vendeurs ». Beaucoup de nos relations sont à résonance de profits. Certains diront que c’est le capitalisme. Le temps, c’est de l’argent. Mais jusqu’où pouvons nous aller comme cela? Ne serions-nous pas en train de revivre ce qui nous a poussé vers les conflits de la seconde guerre mondiale? De plus en plus d’états européens adoptent une politique d’extrême droite. L’exclusion est monnaie courante. La soumission à l’argent roi n’est elle pas le prémices d’un regard sur nous même où nous acceptons de n’être que des objets utiles?
Changer notre regard, revenons au source de l’être.
Dans les années 30, découvrant la phénoménologie, Binswanger, psychiatre suisse, change de paradigme. Là où Freud observe l’être humain comme déterminé dans une dualité sujet-objet, Binswanger s’empare de la notion d’« être-au-monde » de Martin Heidegger, philosophe allemand. Il essaye une nouvelle méthode thérapeutique. A la fin des années 50, il la présente sous le nom de « Dasein analyse » inspirée d’Edmund Husserl, philosophe autrichien et de Martin Heidegger. « L’analyse existentielle ” consiste à décrire la structure de l’existence humaine en tant que telle sans jugement ni à priori.
Puis peu à peu, Binswanger s’écarte d’Heidegger. En effet pour Binswanger, l’humain est présence. Sa méthode considère l’Etre dans son existence, en s’intéressant à sa façon d’être au monde, dans sa spatialité, sa temporalité, son rapport au corps et avec les autres alors que pour Heidegger, « l’être au monde » au quotidien est préoccupation et soucis. Etre dans la moyenne, selon lui, c’est être au monde au sens du soucis quotidien. Toute relation au monde est organisé autour de cette préoccupation… mais le «ON» nous fait vivre rupture et angoisse. Binswanger, quant à lui, propose, au contraire, une forme première qui seule permettrait d’exister en tant qu’être humain, une forme non solitaire : la «nostrité», source et origine de la confiance en soi.
La pathologie, selon lui, serait une défaillance de cette première matrice fondamentale. Alors que pour Heidegger, autrui est vécu comme ce qu’il fait. Il n’est pas «autrui différent de moi». Autrui est dans mon monde. Je l’utilise sans me le représenter. L’Autre, peu différent de moi, m’amène à l’indifférence créant en moi un horizon de compréhension médiocre. Pour Binswanger, il y a autre chose que ce «on». Il y a le «NOUS» ou «NOSTRITE». Il écrit «la temporalité de l’être ensemble aimant ne se comprend pas comme préoccupation de l’être à porté de main.»
Alors que l’Autre dans la vision de Heidegger devient outils, (n’oublions pas qu’Heidegger adhéra au nationale socialisme en 1934) pour Binswanger, il y a une autre dimension : la confiance.
La confiance est fondatrice de sécurité. Elle permet une relation aimante à l’autre qui ne peut se laisser réduire à son utilisation à l’égal d’un objet.
L’amour doit donc s’opposer à la préoccupation quotidienne. «Les amants ne sont en soucis de rien» dira Binswanger. Cela fait que «être au monde» n’est pas une privation mais une plénitude d’être.
Le Zen, je le compris plus tard, développe une présence à soi. C’est inutile, heureusement, mais nécessaire voire vital. La sophrologie est le continuum de la phénoménologie et du Zen. Alfonso Caycédo s’en imprégna pour créer sa méthode. A chaque fin de séance nous réactivons la confiance, l’équilibre et l’espoir.
Alfonso Caycédo, dans son discourt de Récife de 1977, offre un objectif à la sophrologie prophylactique : lutter contre les effets de la consommation de masse qui serait, selon lui, le pire fléaux que nous n’ayons jamais eu à supporter. A l’heure des soldes, cela peut nous faire réfléchir.